
"Opéra d'Casbah" :
l'auto-dérision de Fellag
"Opéra d'Casbah", le
spectacle musical écrit et joué par le comédien et
humoriste algérien Fellag et mis en scène par Jérême
Savary, s'est installé, après sa récente création à
Marseille, à Paris Salle Favart pour 56 représentations
jusqu'au 29 juin.

Depuis le 24 avril,
sans grande campagne médiatique, cette production fait
dans la capitale des salles combles où l'on retrouve,
côte à côte, plusieurs générations d'Algériens
installés en France, d'anciens Français d'Algérie et
de Français métropolitains qui suivent depuis quelque
temps et apprécient l'auto-dérision de Fellag et aussi
son "goût de la réconciliation". Cet artiste
kabyle ne déçoit pas par un humour intact, par son
maniement subtil de la langue française, et par une
grande gentillesse.
Ce qui ne l'empêche pas d'asséner quelques vérités
bien senties sur les réalités politiques dans son pays,
en France et dans le monde actuellement. Jérôme Savary
s'est montré en revanche parfois plus inventif dans ses
mises en images et en lumières et dans sa direction
d'acteur. Sept musiciens sont disposés derrière un
tulle au fond du plateau. Sur ce fond et ce sol sont
projetés des agrandissements de cartes postales
d'Algérie datant de l'époque coloniale -rues de villes
et visages de femmes- et des motifs décocatifs arabes.
Quatre danseuses du ventre viennent parfois ponctuer les
deux parties biens distinctes du spectacle : l'une
"Ma Casbah", jouée et chantée par la
comédienne Biyouna et l'autre assurée par Fellag qui
livre à son public la méthode "Comment réussir un
bon petit couscous". "Opéra d'Casbah" ne
porte pas le label de "l'Année de l'Algérie en
France" : son créateur n'y tenait pas. "Fellag
est un poète qui choisit l'humour pour s'exprimer",
commente Jérôme Savary qui apprécie également son
écriture.
"Ce spectacle est une véritable coopération
fraternelle entre nous", ajoute-t-il. Fellag est un
ancien élève de l'Institut national d'art dramatique
d'Alger. Après un début de carrière dans son pays
comme comédien, metteur en scène, auteur de spectacles
en solo et comme directeur de théâtre à Bougie, il a
dû s'exiler en France en 1995. Il est connu du public
francophone pour ses "one man show", notamment
"Djurdjurassique Bled" et "Un bateau pour
l'Australie".

Bernard Faivre d'Arcier : dernier
Festival d'Avignon
Bernard Faivre d'Arcier, directeur
artistique sortant du Festival d'Avignon dont il assume
encore l'édition 2003 (8-28 juillet), a
commenté, lundi soir à Paris au cours d'une conférence
de presse, son dernier programme, "réunion de
personnalités fortes et de nouveaux venus".

Une affiche en fait
connue depuis début mars par le site internet de la
manifestation (www.festival-avignon.com). Près de deux cents personnes
assistaient à cette réunion et ont longuement applaudi
M. Faivre d'Arcier qui aura assuré la programmation de
seize festivals avec comme directrice administrative
Christiane Bourbonnaud.
Les deux directeurs désignés pour 2004 sont Vincent
Baudriller pour l'artistique et Hortense Archambault,
adjointe pour l'administration. Tous deux occupaient
déjà des postes de responsabilité au sein du festival,
le premier comme adjoint à la programmation et la
deuxième comme administratrice. "Je puis dire
maintenant que le Festival est un formidable instrument,
rodé, expérimenté dans tous les compartiments de son
activité, de la technique à l'accueil des artistes et
que sa capacité de production devrait être à l'avenir
résolu, car le festival devrait être doté des moyens
de ses créations, au moins en ce qui concerne les quatre
ou cinq spectacles emblématiques de chaque
édition", a commenté Bernard Faivre d'Arcier.
Les Belges, avec les metteurs en scène-chorégraphes
Alan Platel et Jan Fabre, investiront cette année en
force la cour d'honneur de l'ancien Palais des papes
d'Avignon, pour ce 57ème festival. Ariane Mnouchkine et
son Théâtre du Soleil , Bartabas et Zingaro, Peter
Brook avec Maurice Bénichou dans "La mort de
Krishna", représenteront cette année les
"figures historiques" de la manifestation.
"Wolf", un spectacle de danse-théâtre de
Alain Platel, fera l'ouverture dans la cour d'honneur
(cinq représentations du 8 au 13), tandis que sous
chapiteau à Châteaublanc, Bartabas frappera les trois
coups avec "Loungta, les chevaux de vent"
(quinze représentations du 8 au 28).
Dans la cour d'honneur, deux autres titres seront
proposés : des reprises du "Platonov" de
Tchekhov, signé Eric Lacascade avec son Centre
dramatique national de Caen (16 au 19), et de "Je
suis sang", le "conte de fées
médiéval", à la frontière de la danse et du
théâtre du Flamand Jan Fabre (24 au 28). Le Théâtre
du Soleil qui partagera le chapiteau de Châteaublanc
avec Zingaro, jouera du 9 au 27 sa création collective
"Le dernier caravansérail".
Avignon 2003 affichera des représentants des
générations suivantes de metteurs en scène dramatiques
français et étrangers: Didier Bezace, Stanislas Nordey,
l'Espagnol d'origine argentine Rodrigo Garcia, un autre
Argentin Ricardo Bartis, le Hongrois Krystian Lupa,
l'Allemand vivant en France Lukas Hemleb, le Lituanien
Osakaras Korsunovas, l'Italien Antonio Latella, le
Polonais Krzysztof Warlikowski.
Les auteurs joués vont de Shakespeare à Martin Crimp en
passant par Didier-Georges Gabily, Valère Novarina,
Pierre Charras, Daniel Danis. La danse sera représentée
par les chorégraphes travaillant en France, notamment
Jean-Claude Gallotta, Angelin Preljocaj, François Verret
et les Belges Anne-Teresa de Keersmaeker et Sidi Larbi
Cherkaoui.
Le programme musique contemporaine reste assuré par le
Centre Acanthes dont l'édition 2003, du 11 au 25 juillet
à la Chartreuse de Villeneuve-les-Avignon, initiera aux
compositions du Français Gilbert Amy, du Suisse Klaus
Huber et du Japonais Toshio Hosokawa.

Les gens "d'en bas" au
Théâtre de l'ouest parisien
Gildas Bourdet qui a pris en main
les destinées du Théâtre de l'ouest parisien (TOP),
successeur du défunt Théâtre de Boulogne-Billancourt
(TBB) dans l'ancienne salle des fêtes de cette ville, y
a a adapté et mis en scène la création en France de
l'Irlandais Martin MacDonagh, "La reine de beauté
de Leenane".

Gildas Bourdet, metteur en scène et directeur
du Théâtre de l'Ouest Parisien
La pièce, créée en
1995, est dans la ligne de Synge, O'Casey et Behan et
comme le souligne Gildas Bourdet, fait "surgir et
parler en pleine lumière des gens +d'en bas+ pour leur
octroyer le statut de héros à part entière,
dussent-ils être tragiques". Dans la minable
cuisine d'une bicoque perdue dans la verte campagne
irlandaise (ambiance reconstituée scrupuleusement par
Edouard Laug et Gildas Bourdet), s'affronte, avec des
mots terribles, une fille, la quarantaine, célibataire,
qui rêve d'autres horizons et sa mère, septuagénaire
tyrannique, qui fait tout pour l'empêcher de se marier
et va provoquer un acte irrepérable et assasssin.
Autres protagonistes deux frères, deux voisins : l'un,
l'aîné, du même âge que la fille, lui a proposé de
le suivre aux Etats-unis, l'autre, le plus jeune est
celui qui va indirectement empêcher que ces deux
destinées s'unissent. Marianne Epin et Isabelle Sadoyan
interprètent, sans chercher à apitoyer leur public, la
détestation réciproque du couple infernal fille-mère
à la langue brutale, presque un "baragouin"
dans l'adaptation qu'en a réalisé Gildas Bourdet.
Vincent Winterhalter et Lorant Deutsch jouent les deux
frères. Gildas Bourdet a cherché a rendre au mieux
l'écriture de Martin MacDonagh, né en 1972 à Londres
de parents irlandais et qui a emprunté au parler rural
du Connemara, truffé de tournures gaéliques. Ce travail
sur la langue du dramaturge anglo-irlandais rejoint les
préoccupations qui sont, depuis "Le
saperleau", celles de Gildas Bourdet qui pense qu'il
faut écrire "davantage avec son oreille qu'avec son
stylo pour rendre la langue de la marge, des
laissés-pour-compte".
Le TOP a ouvert ses portes fin février avec une reprise
d'une production du "Malade imaginaire" de
Molière par la compagnie Gildas Bourdet. Après cette
pièce irlandaise du 22 avril au 28 mai, sera joué un
"classique" du 20ème siècle "Les
chaises" de Ionesco, mise en scène de Laurent Pelly
du 11 au 28 juin.

Les subtilités du théâtre nô
à la Fondation Mona Bismarck
Lourdes soieries façonnées, gazes
à décor broché, tissages polychromes ou sobres
dégradés: les costumes du théâtre nô présentés
jusqu'au 7 juin à Paris à la fondation Mona Bismarck
témoignent des subtilités d'un art rigoureusement
codifié, qui reste souvent mystérieux pour le
spectateur occidental.

Costumes japonais traditionnels
présentés à Paris en 1997
Né au Japon au XIVe
siècle sous l'impulsion de deux auteurs-acteurs, Kan'ami
et son fils Zeami, le nô, union du théâtre, de la
danse, de la musique et du chant, associe la simplicité
de quelques éléments fondamentaux, comme le décor ou
l'intrigue, à la complexité des techniques de jeu.
Historiquement réservé à une élite, l'art du nô a
failli disparaître à la fin du XIXe siècle, ne devant
son salut qu'à la ténacité de quelques passionnés.
Ouvertes à de nouvelles influences, sa pratique a connu
un regain d'intérêt au cours des dernières décennies.
Dans cette forme artistique qui prône les vertus
libératrices de la beauté, costumes et accessoires,
tout particulièrement les masques portés par les
acteurs qui incarnent indifféremment les personnages
masculins et féminins, jouent un rôle aussi important
que le texte déclamé ou chanté. A l'origine, les
acteurs du nô portaient des vêtements de samouraïs
-leurs protecteurs-, qui leur étaient souvent offerts en
guise de remerciement à l'issue des représentations.
La tradition s'est perpétuée avec la création de
somptueuses tenues de scènes témoignant d'un savoir
faire unique. Toutefois, en raison de leur extrême
fragilité, très peu de pièces anciennes ont été
conservées. Fasciné par cet art, le Japonais Yamaguchi
Akira, né dans une famille de tisserands à Kyoto, s'est
attaché à faire revivre la beauté des costumes de
l'ère Edo (1603 - 1867), symbole de raffinement et de
perfection.
Une passion qui l'a conduit à créer le Kamaguchi Noh
Costume Reseach Center, un centre textile qui fabrique
des soieries tissées selon un processus conforme à
l'esprit et aux techniques anciennes, de l'élevage du
ver à soie aux teintures naturelles en passant par le
choix des motifs reproduits.
Somptueuses robes d'intérieur aux motifs floraux et
couleurs ardentes réservées aux rôles de femmes
(Karaori), vestes légères à manches larges dédiées
à la danse (chôken), manteau de chasse (Kariginu)
figurant la noblesse, les (re)créations de M. Yamaguchi,
dont une cinquantaine de pièces sont exposées, sont
aujourd'hui régulièrement portées par les plus grands
interprètes contemporains de nô.
Quelques masques anciens et contemporains sculptés dans
le bois et une série d'estampes prêtées par le musée
Guimet complètent cette singulière initiation à
l'univers poétique du nô. (Mona Bismark Foundation, 34,
avenue de New York, Paris 16e, jusqu'au 7 juin de 10h30
à 18h30, fermé dimanche et lundi - Entrée libre).

Woody Allen fait sa première
mise en scène de théâtre
Woody Allen va faire en mai, dans un
petit théâtre new-yorkais, ses débuts de metteur en
scène de théâtre, avec une pièce en deux actes,
"Writer's block" ("La panne de
l'écrivain") dont il est également l'auteur.

Si le cinéma l'a
rendu célèbre, surtout en Europe, Woody Allen n'a
jamais cessé d'écrire des pièces de théâtre, dont la
première "Don't drink the water" ("Ne
buvez pas l'eau") en 1966. Certaines, comme
"Play it again, Sam", ont été ensuite
adaptées au grand écran. C'est la première fois qu'il
va diriger des acteurs sur des planches. "De temps
en temps j'ai une idée qui me paraît plus adaptée à
la scène qu'à l'écran", a-t-il confié au New
York Times.
"Les deux actes qui constituent +Writer's Block+
sont de celles-là. Je n'ai jamais rien dirigé au
théâtre et je ne sais pas du tout si j'ai le talent
nécessaire". Le premier acte de "La panne de
l'écrivain" s'intitule "Riverside Drive",
nom d'un quartier du nord de Manhattan, et se passe à
New York. Le deuxième s'appelle "Old
Saybrook", nom d'une petite ville résidentielle du
Connecticut (nord de New York).
Woody Allen a engagé comme acteurs des valeurs sûres de
Broadway comme Bebe Neuwirth (Tony Award pour son rôle
dans la comédie musicale "Chicago") et Paul
Reiser. Les répétitions ont commencé le 23 avril, la
première est prévue le 15 mai.

Nord-Ost : après la prise
d'otages, l'échec commercial
Les promoteurs de la comédie
musicale russe Nord-Ost, mondialement connue pour avoir
été "prise en otage" avec son audience par un
commando tchétchène en octobre, ont définitivement
tiré le rideau mardi, l'odeur de la peur et de la mort
ayant chassé les spectateurs.

Le théâtre de la
Doubrovka à Moscou, rapidement remis à neuf, avait
rouvert le 8 février dernier pour une nouvelle première
présentée comme une victoire symbolique sur le
terrorisme. Mais les Moscovites ne sont pas revenus et le
spectacle disparaîtra de l'affiche le 10 mai prochain.
"Les gens ont peur de venir dans ce théâtre.
Beaucoup de ceux qui viennent, sentent une énergie
négative", a affirmé devant la presse
l'auteur-producteur du spectacle Gueorgui Vassiliev.
"Nous sommes forcés d'arrêter le spectacle",
a-t-il ajouté. Au lendemain du drame, lors duquel 41
membres du commando tchétchène avaient pris en otages
quelque 800 personnes, dont 129 ont péri, tués par un
gaz utilisé par les forces de l'ordre lors de l'assaut,
M. Vassiliev avait tout d'abord refusé de reprendre
Nord-Ost au même endroit. "Nous ne pouvons jouer
dans cette salle. Elle est tachée de sang.
Même si les autorités de Moscou la reconstruisent, cet
endroit restera maudit", avait-il déclaré. Deux
jeunes acteurs, âgés de 13 et 14 ans, ainsi que huit
musiciens, avaient péri. Mais le maire de Moscou, Iouri
Loujkov, a insisté pour que le spectacle reprenne au
théâtre de la Doubrovka et a assuré le financement des
travaux. Les fauteuils couverts de velours rouge tachés
de sang ont été retapissés en bleu et la fosse
d'orchestre, transformée en latrine pendant la prise
d'otages, a été comblée, les musiciens se retrouvant
ainsi plus près du public.
Mais les ventes de tickets ont été très décevantes,
à peine la moitié de ce qu'elles étaient avant la
prise d'otages. Et la mairie était contrainte de
subventionner le théâtre en achetant des spectacles
entiers offerts au personnel médical et aux sauveteurs
ayant aidé les otages. Nord-Ost, première comédie
musicale 100% russe, avait jouée à guichets fermés
depuis octobre 2001. Mais elle a finalement fait perdre
de l'argent aux producteurs. Cependant, M. Vassiliev a
déclaré qu'il ne regrettait pas de l'avoir reprise.
"Nous sentions dans nos coeurs que nous devions la
rejouer", a-t-il dit.
La
cour de Moscou rejette l'appel des victimes
Le tribunal municipal de Moscou a rejeté lundi les
appels de trois groupes de familles de victimes de
l'assaut donné en octobre dernier au théâtre de Moscou
pris en otage par des sécessionnistes tchétchènes. Les
demandes de dommages et intérêts avaient été
rejetées une première fois le 23 janvier. "Nous ne
sommes pas surpris", a déclaré Me Igor Trunov, qui
représentait une centaine de rescapés et de parents des
victimes.
L'avocat, qui s'attend à ce que 21 autres groupes soient
pareillement déboutés mardi, compte faire appel auprès
du présidium du tribunal municipal de la capitale et
demander à la Cour européenne des droits de l'Homme, à
Strasbourg, d'examiner les dossiers.
Le 23 octobre 2002, des rebelles tchétchènes armés
avaient pris en otages pendant trois jours quelque 800
personnes dans un théâtre de Moscou. Tous les pirates
ont été tués, et 129 otages sont morts à la suite de
l'assaut donné par les forces spéciales, qui ont
utilisé des gaz pour neutraliser les rebelles. Les
plaignants reprochent aux autorités de ne pas avoir
empêché l'assaut et d'avoir mal organisé l'évacuation
des otages malades.
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